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Au Nom d'Allah Le Miséricordieux Le Très Miséricordieux
A la mort du troisième calife, 'Uthmân, le monde musulman connut une guerre de succession, qui se renouvela plusieurs fois en vingt ans; une demi-douzaine de souverains vinrent puis s'en allèrent. Avec l'avènement d'Abd al-Malik (685-705), le gouvernement retrouva sa stabilité, et une nouvelle vague de conquêtes commença. Le Maroc et l'Espagne d'un côté, et le Nord de l'Inde ainsi que la Transoxiane de l'autre, furent ajoutés aux domaines des Musulmans. Nous voyons Bordeaux, Narbonne et Toulouse (en France) passer aussi en leurs mains.
La Métropole se déplaça de Médine à Damas. Mais lorsque la ville sainte du Prophète eut cédé la place à un endroit jadis byzantin, la ferveur religieuse aussi s'affaiblit en faveur de considérations profanes. Il n'y manquera ni le luxe ni le gaspillage, ni le favoritisme avec les soulèvements qu'il entraîne; mais non plus les conquêtes dans les domaines intellectuels et sociaux.
L'industrie prit un grand essor; la médecine surtout fut patronnée par le gouvernement, qui entreprit la traduction arabe des ouvrages étrangers, grecs et autres.
Le court règne de 'Umar ibn 'Abd al-Azîz (817-20) fut particulièrement brillant : Monogame, ce calife par sa piété, renouvelait l'époque d'Abû Bakr et de 'Umar. Il révisa les anciens dossiers de confiscation, afin de rendre les biens à leurs vrais propriétaires, ou aux héritiers légitimes. Il abolit maintes taxes injustifiables. Il était inflexible en faveur d'une justice impartiale, même quand l'oppresseur était un Musulman et l'opprimé un non-Musulman. Il n'avait même pas hésité à donner l'ordre de démolir une partie de la grande mosquée de la capitale (cf. supra § 434), parce qu'on l'avait construite sur un terrain usurpé à des Chrétiens. Il alla jusqu'à ordonner l'évacuation de villes traîtreusement occupées par les armées musulmanes. Le résultat fut étonnant : Au début de cette dynastie, les revenus de l'Iraq, par exemple, montèrent à 100 millions de dirhams, pour retomber à 18 millions seulement sous le prédécesseur de 'Umar II ('Umar ibn 'Abd al-Azîz); et sous ce dernier, Ils remontèrent jusqu'à 120 millions. La dévotion religieuse de 'Umar II fit une telle impression que même les rois du Sind embrassèrent l'Islâm. On s'intéressa aux études religieuses, et toute une pléiade d'érudits surgit, qui créa les traditions de la science au sein de la communauté musulmane. La suppression rigoureuse de la corruption améliora partout l'administration.
Parmi les monuments architecturaux de l'époque, nous possédons encore le dôme, construit en 691, sur le rocher de Jérusalem. Les ruines ou les vestiges des autres monuments, à Damas et ailleurs, témoignent de l'essor, également précoce, des Musulmans dans ce domaine. On parle aussi d'un grand développement de la musique à cette époque; mais comme les signes de notation n'étaient pas encore inventés, il nous est difficile aujourd'hui de nous en rendre compte.
Les deux grandes groupes au sein des Musulmans, les Sunnites et les Chî'ites, datent de cette même époque Elles sont nées d'une question politique : la question de savoir si la succession du Prophète devait se faire par élection ou, par voie d'héritage, entre les proches parents du Prophète ? En devenant pour les Chî'ites une question de dogme, le schisme s'est ramifié, occasionnant des guerres civiles. L'un de ces soulèvements balaya la dynastie ‘Ummayyade, qui céda la place dès 750 aux 'Abbasides, sans que les Chî'ites eussent pu en profiter. A notre époque, Il y a probablement 10 % des Chî'ites chez les Musulmans du monde, le reste étant presque entièrement composé de Sunnites — pour ne pas parler d'une secte infinitésimale, les Kharijites, formée également à la même époque.
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